Aujourd'hui, LundiCarotte remet le couvert. Le bœuf, le porc et la volaille sont les viandes les plus consommées en France, mais ce ne sont pas les seules. Avant de prendre un peu de recul sur l’ensemble de nos précédents articles sur le sujet, nous vous proposons un rapide tour d'horizon des autres viandes de notre pays.

La viande dans tous ses états

Le 22 janvier 2023
Aujourd'hui, LundiCarotte remet le couvert. Le bœuf, le porc et la volaille sont les viandes les plus consommées en France, mais ce ne sont pas les seules. Avant de prendre un peu de recul sur l’ensemble de nos précédents articles sur le sujet, nous vous proposons un rapide tour d'horizon des autres viandes de notre pays.
Vignette de l'article La viande dans tous ses états

Le silence des agneaux

La consommation de viande ovine (moutons, brebis et agneau confondus) est assez marginale : 2,7 kilogrammes par habitant et par an, bien loin des 20,7 kg de viande de volaille. A noter que cette consommation est en baisse, et que la plupart des consommateurs et consommatrices d'agneaux sont âgés de plus de 50 ans !
Selon l'Ademe, il vous en coûtera 3,2 kg de CO2 eq pour 100 grammes de viande d'agneau, soit trois fois plus que la viande de bœuf. En cause : le méthane (encore lui) émis lors de la digestion de ces animaux.
En somme, si l'on veut consommer des viandes à faible bilan carbone, l'agneau est à éviter le plus possible (suivi du bœuf).

Le coup du lapin

La consommation de viande de lapin est encore plus faible : un peu moins de 500 g par habitant et par an en 2022. Son bilan carbone est comparable à celui de la viande de poulet, c'est-à-dire la fourchette basse.
« La grande majorité des lapins est élevée en cage sur une surface ne dépassant pas une feuille A4. »
Information marquante : une grande partie des lapins est élevée en cage. Des conditions de vie relativement préoccupantes pour les consommateurs : un rapport de l'Ifop (Institut français d'opinion publique) déconseille en effet aux industries de l'élevage de lapins de diffuser des images d'élevages professionnels au grand public, en raison de "la vision anthropocentrique que les consommateurs ont du bien-être animal [...] et, d’autre part, des impressions négatives suscitées par le confinement des lapins en bâtiment et leur concentration au sein des cages, évoquant la recherche première de productivité". Une recommandation qui donne à réfléchir.

Le dindon de la farce

Le sujet a peut-être animé vos préparations des repas de fêtes, le soir de Noël, la dinde a la cote chez les Français. Elle partage le top des viandes préférées pour le réveillon avec d’autres volailles : chapon, poulets et canards.
D'après le CIWF (Compassion in World Farming), une proportion très importante des dindes élevées en France vit en élevage intensif dans des conditions de surpeuplement (il n'existerait pas de limitation aux surfaces d'élevage des dindes).
Cependant, les dindes vendues sous label biologique ou Label Rouge souffrent sans doute moins que leurs congénères de l'élevage intensif : elles ont accès au plein air et les concentrations d'animaux sont quelque peu limitées. Mieux vaut donc favoriser les labels pour vos fêtes !

La ferme des animaux

De toutes nos recherches sur la viande, il ressort trois enjeux écologiques bien distincts : la production et le transport du fourrage, le cycle de vie des animaux et la gestion de leurs excréments.
« Au-delà de l’élevage pur et dur, la nourriture et les déjections des animaux sont des enjeux écologiques majeurs. »
Alerte tisane ! La rédaction vous conseille de prendre une grande inspiration et une infusion aux plantes pour appréhender les prochaines lignes sans être démoralisé. En synthèse, voici les différentes problématiques soulevées par l’élevage :
  • D'importantes émissions de gaz à effet de serre, en l'occurrence 14,5 % des émissions mondiales d’après la FAO en 2014. Selon Greenpeace, d'après la FAO, ils se décomposent de la manière suivante : 25 % de dioxyde de carbone, 50 % de méthane et 25 % de protoxyde d’azote, sachant que ces derniers ont des potentiels de réchauffement beaucoup plus élevés que le CO2 − respectivement 23 et 296 fois plus forts. Ça donne le tournis !
Ci-dessous, une illustration de l'AVF reprend les différentes émissions en CO2, CH4 et N2O liées à l'élevage.
Illustration
Par ici pour agrandir
  • Une déforestation, intimement liée à des émissions de CO2. 63 % de la déforestation amazonienne sont imputés aux pâturages et à la culture de fourrage. Seulement, en détruisant la forêt, on laisse s’échapper le CO2 qu’elle contenait, on l'empêche d'en absorber à nouveau et on perturbe la faune. Dans la région du Cerrado au Brésil, qui abrite 5 % de la biodiversité mondiale, la déforestation est particulièrement menaçante.
  • Une pollution chimique des sols et des rivières par l’épandage d'engrais et de déjections d'animaux d'élevages. Ceux-ci relâchent des nitrates, du phosphore, mais également des antibiotiques qui partent ensuite dans les cours d’eau par ruissellement. Ces substances modifient la faune et la flore : dans les rivières et les mers, les algues absorbent l’oxygène et provoquent l'asphyxie des poissons, tandis que les médicaments (ceux des animaux et ceux des humains) modifient leur comportement.
  • Une consommation importante de ressources. D'après la FAO, la production d'une calorie de produit animal requiert de produire en amont quatre fois son équivalent en calories végétales (un chiffre qui monte même jusqu’à onze pour la viande de bœuf).
  • Notre rapport aux animaux en question. Une partie du monde scientifique s'accorde sur le fait que les animaux d'élevage sont doués de conscience et qu'ils sont capables de souffrir (même si le sujet est complexe). Au-delà de la prépondérance de l'élevage intensif, tout cela génère de vigoureux débats éthiques sur le droit des humains à imposer de la douleur aux bêtes qu'ils élèvent, débats périodiquement ranimés par les enquêtes de diverses associations de défense des animaux.
  • Une situation économique intenable pour beaucoup d’éleveurs. En 2021, d'après cet article de France 3 régions, si les agriculteurs des Pays de la Loire touchaient, par exemple, en moyenne 22 500€ par an, les éléveurs bovins quant à eux touchaient 13 500€, soit moins du SMIC. En cause, des prix tirés vers le bas par les grandes surfaces et notamment par les courses aux promotions qui ne reflètent pas la valeur réelle du travail. Pourtant, la loi EGalim de 2018 voulait rééquilibrer les relations entre éleveurs, industriels agro-alimentaires et enseignes de distribution. Il semble donc y avoir encore du grain à moudre.

Alors, qu’est-ce qu’on fait ?

On espère qu’il vous reste un peu de tisane !
Illustration
Face à tous ces faits alarmants, une question s'impose : peut-on continuer à produire au rythme actuel tout en préservant l’environnement ?
Des solutions partielles existent, mais elles ne répondent qu’à une partie des problèmes, parfois même en augmentant l’impact dans un autre secteur.
Par exemple, on pourrait envisager de revenir à un élevage extensif des animaux pour diminuer la quantité de fourrage importée et améliorer leurs conditions de vie. Seulement, la quantité de terres agricoles nécessaires pour élever toutes ces bêtes augmenterait fortement, ce qui risquerait de générer de la déforestation supplémentaire.
D'autre part, certaines améliorations dans le domaine du bien-être animal nécessiteraient de laisser vivre les bêtes plus longtemps. Le hic, c'est qu'il faudrait donc produire plus de nourriture pour les alimenter et émettre ainsi davantage de GES par kilogramme de viande. C’est le serpent qui se mord la queue ou plutôt, la poule qui se picore le croupion !
Certaines de ces solutions sont encouragées au niveau local ou français, à petite échelle, par des organismes de certification, comme le label Agriculture Biologique, les circuits courts, le Label Rouge.
Après avoir étudié le sujet en profondeur, la Rédac' est d'avis qu'un modèle plus respectueux de l'environnement et des animaux nécessiterait que nous réduisions notre consommation de viande. Le GIEC a lui aussi mis les pieds dans le plat en 2014 et estimait que “si on limitait la consommation moyenne de viande de ruminants à 10 g par jour et la consommation d'autres chairs animales et d'œufs à 80 g par jour, cela réduirait de 36 % les GES d'origine agricole et de 8 % les émissions totales”. Cela représenterait quelque 33 kg de viande par an par habitant, contre une moyenne actuelle de 93 kg. Cette quantité se décompose en 13 kg d'œufs, et 80 kg de viande ("poids équivalent carcasse").
« Il faudrait réduire de plus de 50 % notre consommation de viande pour diminuer d’un tiers les émissions de GES du secteur agricole français. »

Les AstucesCarotte pour s'empiffrer sereinement

  • On peut considérer qu'un repas n’est pas forcément centré autour de la viande.
  • Lorsque l'on mange de la viande, se tourner dans l'idéal vers les filières les plus engagées pour l'environnement et les producteurs.
  • Et pourquoi ne pas profiter des résolutions du Nouvel An pour réduire notre consommation de viande ? On vous conseille deux initiatives : le veggie challenge et le weekday vegetarian (végétarisme en semaine).
  • Et pour l'année prochaine, pourquoi pas un coup de poker en s'essayant à un menu de Noël végétarien ?
Voilà, on vous a tout dit. Tout ce qui nous est passé par la tête et devant les yeux en enquêtant sur la viande et sa filière en France. Mais si vous pensez en avoir fini avec l’élevage, détrompez-vous, les chevaliers de la Carotte reviendront prochainement pour vous parler truite et morue ! D’ici là, on vous souhaite une très bonne semaine.
Servane Courtaux et Paul Louyot
Partager ce LundiCarotte
MAILTWFB