Après notre enquête "Le téléphone pleure" sur les smartphones, quoi de plus naturel que de sortir son alter ego pour les ordinateurs portables. Et bien voilà, c'est cadeau, c'est aujourd'hui !

L'ordinateur pleure

Le 11 décembre 2017
Après notre enquête "Le téléphone pleure" sur les smartphones, quoi de plus naturel que de sortir son alter ego pour les ordinateurs portables. Et bien voilà, c'est cadeau, c'est aujourd'hui !
Vignette de l'article L'ordinateur pleure
Contrairement à notre dossier sur les smartphones, dans lequel nous avons détaillé les impacts environnement et sociétaux regrettables, nous allons vite passer dessus pour les ordinateurs. C'est globalement les mêmes sujets. Quelques chiffres quand même : la production représente autour de 1500 litres d’eau, 240 kg d’énergie fossile (plus ou moins pétrole ou charbon) et 22 kg de produits chimiques, qui polluent les eaux sont potentiellement dangereux pour la santé. Bref, voilà pour les bonnes raisons de faire attention, concentrons-nous maintenant sur les moyens de s'en sortir.
Commençons notre inventaire avec le classement proposé par Greenpeace (ENG), qui prend en compte trois axes de pollution majeurs :
  • l’énergie nécessaire à la production
  • des produits chimiques dangereux qu’ils contiennent ou qui sont nécessaires à la production
  • de la gestion des matières premières, la réparabilité, et la recyclabilité
On en retire entre autre qu'Apple caracole en tête grâce à leur objectif de passer au 100% énergie renouvelable, suivie de près par HP, qui s’est engagé à réduire son empreinte carbone et qui fabrique des produits réparables et améliorables, et DELL, qui a instauré un système fermé d’utilisation de plastique. ASUS est l’une des marques notoires les moins vertes.
On peut commencer par se demander de quel ordinateur on a besoin. À quoi va-t-il servir ? Voici un petit guide pour se poser les bonnes questions. La question la plus cruciale est peut-etre de savoir si on a besoin d'un ordinateur portable ou d'un ordinateur fixe. Un ordinateur fixe a la grande vertu d'être facilement réparable et de vivre en général plus longtemps. En revanche il consomme plus d'electricité (entre 150 et 300 kWh par an pour les portables contre environ 600 kWh pour les fixes).
Pour ce qui est de la durée de vie des ordinateurs, une étude de l’assureur SquareTrade faite en 2009 concluent que les plus résistants sont Asus et Toshiba avec 15% de panne dans les 3 ans qui suivent l'achat. HP est le mauvais élève, avec 25%. C’est aussi l’avis de l’association d’informatique de l’ENSTA-Paristech : “la durée de vie des ordis HP est tellement faible que acheter un HP s'apparente plus à de la location tellement vous n'allez pas le garder longtemps.”
Concrétement, comment savoir si un ordinateur portable est facilement réparable ?

On peut vérifier sur des sites comme iFixit si un modèle est facile à réparer. Par exemple, pour remplacer le clavier des modèles les plus vendus en 2015, la difficulté indiqué est :
  • ACER Aspire E5-571 : modérée
  • MacBook Air 13’’ : difficile
  • Lenovo ideapad flex 15 : pas de tuto
  • Asus Zenbook UX303 : modérée
Note de réparabilité générale pour les mêmes ordinateurs :
  • ACER Aspire E5-571 : 8/10
  • MacBook Air 13’’ : 4/10
  • Lenovo ideapad flex 15 : 9/10
  • Asus Zenook UX30 : pas de note
Pour conserver votre ordinateur, chouchoutez-le. Les causes les plus communes d’endommagement sont : les enfants, les animaux de companie, la salle de bain, les miettes et les cendres, une températures trop basses ou trop élevées (il faut rester entre 10°C et 35°C !), et l'ordinateur posé au sol... Aussi contrairement à une idée vraie il y a dix ans mais obsolète en raison des nouvelles technologies, les batteries aujourd'hui se conservent mieux si elles ne descendent pas en dessous de 20%. Enfin, un bon pare-feu protégera mieux l'ordinateur. AV-test, qui contrôle la plupart des antivirus sur le marché, propose un classement de performance des antivirus Windows et Mac.
Côté des labels, on peut regarder par exemple Energy Star (ENG), pour la consommation d'électricité durant l'utilisation, ou TCO (ENG) qui surveille des critères environnementaux et societaux de tout le cycle de production et de vie du produit.
Pour finir trois petites astuces qui peuvent vous intéresser :
  • on peut aussi louer son ordinateur portable. Par exemple l’entreprise Commown propose de louer des ordinateurs durable et de qualité, avec la réparation à leur charge pendant 10 ans.
  • si vous ne cherchez pas le dernier modèle, vous pouvez en acheter un seconde main à prix réduit, chez Emmaüs par exemple.
  • un ordinateur en veille consomme un tiers de ce qu’il consomme en utilisation. Ça vaut le coup de l’éteindre complètement quand on a fini de l'utiliser.
Voilà-voilou. Vous avez peut-etre remarqué, nous n'avons parlé que des aspects écologiques de notre sujet du jour... curieux non ? L'explication est la suivante : comme le sujet en question est vaste, nous vous livreront la suite de notre enquête mercredi !
Après le premier épisode sur les ordinateurs écologiques de ce lundi, découvrez le second volet de la saga, avec un tour d'horizon des impacts sociétaux de nos ordinateurs portatifs.
Premier sujet, et non des moindres : les minerais de conflits. Les ordinateurs contiennent en effet de l'or, de l'étain et du tantale, qui ont tous le regrettable point commun d'alimenter des guerres. La plus grosses partie provient de la République Démocratique du Congo, où la vente de ces ressources alimente des conflits armés sanglants (27 selon Le Monde). L’association Enough Project a fait un classement de certaines marques qui tient compte de la connaissance que celles-ci ont de l’origine de leur minerais, de leur transparence, et de leurs efforts pour s'approvisionner dans des mines indépedantes de ces conflits. Voici les scores :
  • Apple — 122
  • Alphabet (Google) — 102,5
  • HP — 76
  • Microsoft — 73
  • Intel — 72.5
  • Panasonic — 42,5
  • IBM — 42
  • Samsung — 17,5
  • Toshiba — 9
Le cobalt contenu dans les batteries lithium-ion des PC portables, s’il n'est pas un minerais de conflit, est très controversé. 60% du cobalt mondial provient de la République Démocratique du Congo, où les mineurs, souvent des enfants, creusent pendant de longues heures au péril de leur vie pour deux ou trois dollars par jour, inhalant des fumées toxiques qui peuvent entraîner des maladies et des déformations chez les nouveaux-nés pour les femmes enceintes. Les ordinateurs fixes contiennent aussi du cobalt mais en infime quantité.
Le second gros dossier des impacts societaux de la fabrication des ordinateurs portables, ce sont les conditions de travail ! Pour des raisons de coûts, l'immense majorité de nos produits sont fabriqués en Chine ou en Asie. Et si la main d'oeuvre y est bien moins chère qu'en Europe, ce n'est pas uniquement parce que le coût de la vie sur place est moins élevé : les ouvriers des usines chinoises ne peuvent que très rarement s'organiser en syndicat, ce qui complique la prise en compte de l'avis des ouvriers dans le fonctionnement. De facto, en Chine, on peut tirer du lit 8 000 ouvriers à minuit pour répondre à une commande pressée. Les normes y sont plus souples au niveau de la sécurité des ouvriers et des produits dangereux.
Selon le classement de "Pain pour le prochain", ce sont Apple, Dell et HP qui font le plus d’efforts pour améliorer les conditions de travail et éviter les minerais de conflit. Ceci est soutenu par cet article (ENG) qui contient des témoignages d’ouvrier travaillant à Foxconn, fournisseur de Apple, HP et Dell. Les conditions sont dures, mais meilleures qu’ailleurs : les heures supplémentaires sont payées, et après une série de suicides, les salaires ont été augmentés de 30%.
On attend avec impatience le premier ordinateur à vocation totalement éthique, à la Fairphone, pour montrer la voie. En attendant, la première souris fabriquée avec cette démarche existe déjà.
Dernier point de friction : une grosse partie des déchets électroniques sont réexpédiés pour se faire recycler par des petites mains dans des pays en voie de développement.Par exemple à Guiyu, 80% des habitants travaillent dans le recyclage des déchets électroniques. Les métaux lourds contenus dans les ordinateurs, comme le cadmium et le plomb, peuvent provoquer des maladies graves et même être mortels. L’air et le sol de la ville sont aussi très pollués, notamment au PBDE, qui peut endommager le foie, la thyroïde et nuire au développement neuronal.
Encore une fois, le recyclage, ce n'est pas magique. Alors raison de plus pour garder son ordinateur le plus longtemps possible. Et après une vie bien remplie, on peut le donner à une association comme Emmaüs qui fera de son mieux pour le raviver ou bien le recycler dans des conditions souhaitables.
Ceci marque la fin de notre double LundiCarotte sur les ordinateurs portables. En tout état de cause, c'est un gros sujet, et nous avons essayé de faire ressortir l'essentiel des enjeux et des pistes d'actions de ce thème.
Alix Dodu, Gaétan Morand et Théodore Fechner
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