On s’intéresse aujourd’hui à l’or, sous toutes ses formes.

Splendide !

Le 30 mars 2022
On s’intéresse aujourd’hui à l’or, sous toutes ses formes.
Vignette de l'article Splendide !

Aurum, auri…

L’or est un métal précieux que l’on connaît depuis longtemps ! Si les premiers ornements en or remontent à plusieurs millénaires, son utilisation en tant que monnaie date du VIe siècle avant J.-C.
C’est un matériau de choix dans la décoration, le textile, mais surtout la bijouterie. Près de la moitié de l’or extrait chaque année est utilisée pour confectionner des parures et autres bracelets. Les plus friands en sont la Chine et l’Inde, où les bijoux en or sont in-con-tour-nables.
On classe les bijoux en fonction du pourcentage d’or pur qu’ils contiennent, les fameux carats ! On les note sur 24 : par exemple, une bague en or 18 carats contiendra 18 parts d’or sur 24 parts de métal, c’est-à-dire 75 %. Le reste est constitué d’autres métaux qui teinteront l’alliage, comme le cuivre (or rose) ou l’argent (or blanc).
Au-delà de son apparence, l’or, de symbole chimique Au, possède également des propriétés physiques intéressantes. C’est un métal facilement malléable, même avec des outils rudimentaires. Il est aussi inoxydable : il résiste à l’eau, à la terre ou encore aux bactéries. Cela explique qu’on le retrouve dans des applications médicales et dans les télécommunications, pour protéger certains contacts électroniques.
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Répartition de la production d’or annuelle mondiale en 2013, d’après le rapport Profundo (anglais) pour le Ministère des Affaires étrangères néerlandaises.
Enfin, l’or reste une ressource assez rare et dont la valeur fluctue peu. C’est pour cette raison que certaines banques en possèdent des stocks importants. Quant aux particuliers, vous faites peut-être partie des 12 % de Français qui déclaraient en 2014 posséder des lingots ou des pièces d’or.

Martine à la mine

L’Eldorado, s’il existe, est éparpillé aux quatre coins de la planète, mais sur le podium mondial de l’extraction aurifère, on retrouve la Chine, l’Australie et la Russie.
Il faut dire que nos bijoux et autres lingots ne sont pas transformés par le toucher de Midas : pour atteindre les fameuses pépites, il existe deux méthodes d’extraction.
L’extraction minière vise l’or contenu dans les roches, dit primaire. On repère des “filons” et on creuse ensuite pour extraire du minerai chargé en or. Il faut compter plusieurs années entre la découverte d’un filon et la mise en exploitation de la mine. Les déplacements de matières sont colossaux et certaines mines, par exemple en Afrique du Sud, peuvent atteindre plusieurs kilomètres de profondeur. Tout ça pour seulement en moyenne 1,6 gramme d’or (anglais) par tonne de minerai. Notons que la production industrielle représente 80 % de l’or, le reste étant produit par des mines dites “artisanales”.
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La mine d’or de Grasberg, en Indonésie, la plus grande du monde - Image Mining Global
L’orpaillage est la deuxième méthode d’extraction du métal, plutôt réalisé de manière artisanale par des petits producteurs. Il vise l’or alluvionnaire, que l’on trouve dans les rivières. Des bateaux sillonnent ces dernières pour en trouver, comme en Guyane, par exemple. Du fait qu’elle est souvent illégale, on trouve peu de documentation concernant l’activité, elle est donc difficile à quantifier.
Malgré l’opacité de ce secteur, nous avons retroussé nos manches pour synthétiser les enjeux de sa production.

Pas si brillantes, ces paillettes...

Si le matériau coûte actuellement environ 41 000 € le kg, les conséquences environnementales et sociales engendrées par son extraction valent elles aussi leur pesant d’or.
D’après une méta-étude publiée en 2018, il faut compter en moyenne pas moins de 23 tonnes de CO2 émises pour produire 1 kg d’or. Sachant cela, la production des 4,58 g d’or contenus dans une alliance 18 carats émet environ 105 kg de CO2, soit l’équivalent d’un aller Paris-Toulouse en avion. C’était le CalculCarotte de la semaine !
« Il faut compter en moyenne pas moins de 23 tonnes de CO2 pour produire un kilogramme d’or. »
De la soixantaine de matériaux extraits de mines, seul le rhodium (un métal précieux très rare) et le platine émettent autant ou plus de CO2 équivalent par kilo que l’or. Ce dernier est cependant extrait en faibles quantités.
Comme pour les autres métaux, l’empreinte carbone de l’or va toutefois croissant par nouvelle tonne extraite. La teneur en or du minerai diminue à mesure que l’on s’approche de l’épuisement de la ressource, ce qui requiert d’autant plus d’énergie pour l’extraction (anglais).
Bilan des courses, selon une analyse du cycle de vie datant de 2014 (anglais), l’or est le cinquième minerai le plus émetteur de gaz à effet de serre par an, en comptant l’extraction et la purification.
Mais l’impact environnemental de l’extraction aurifère ne s’arrête pas là !
En raison de l’utilisation de mercure dans l’orpaillage, les rivières sont parfois polluées au méthylmercure. Pis, cette substance reste dans les tissus des poissons par bioaccumulation et finit par se retrouver dans l’assiette des humains qui les consomment. C’était le cas en Guyane où, en 1999, les cheveux de plus de la moitié des Amérindiens du peuple Wayana contenaient des taux de mercure supérieurs au seuil maximal (pdf) admis par l’OMS.
Un autre produit très nocif est utilisé pour extraire l’or : le cyanure. Il peut engendrer une pollution des cours d’eau si les bassins dans lesquels il est retenu se fissurent, comme ce fut le cas en 2000 en Roumanie. La faune et la flore d’un affluent du Danube avaient alors été éradiquées sur 400. Rappelons que seuls 200 mg de cyanure suffisent à tuer un être humain ! Ça donne le tournis !
« En Roumanie, en 2000, la faune et la flore d’un affluent du Danube ont été éradiquées sur 400 km à cause de rejets de cyanure. »
Comme toutes les exploitations minières, l’exploitation aurifère est susceptible d’engendrer une pollution des nappes phréatiques par pénétration de produits toxiques dans le sol, une déforestation massive ou encore l’utilisation de quantités colossales d’eau (liste non exhaustive, à notre grand regret).
Jusque-là, on n’adore pas. Cerise sur le gâteau, l’aspect social de l’exploitation aurifère n’est pas très reluisant non plus.

À faire pâlir Émile Zola

Tout n’est pas toujours rose dans les mines, loin de là. Dans les mines dites “artisanales”, voire “illégales”, les conditions sont rudes : pas d’équipement de sécurité, exposition au mercure et au cyanure, effondrement des tunnels. Selon l’Organisation internationale du travail (anglais), ce secteur serait aussi l’une des pires formes de travail des enfants. Même dans les mines de grande envergure et légales, la température de la roche peut être très élevée, à plusieurs kilomètres de profondeur.
Retour à la surface : du côté de l’orpaillage, la pratique est également risquée. Les bateaux se livrent un conflit armé et l’extraction est réalisée sous haute tension. En Guyane, par exemple, les “garimpeiros”, chercheurs d’or clandestins brésiliens, ont créé toute une chaîne logistique qui leur permet de maintenir leur activité alors même que cette dernière est combattue par la gendarmerie.
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L’orpaillage illégal, la première menace sociale, sanitaire et environnementale en Guyane d’après le WWF - Image WWF
De manière générale, un petit volume d’or ayant une haute valeur financière, c’est un produit de choix pour le trafic. À l’instar du tantale et du tungstène, il fait partie des minerais du sang dans certains pays comme l’Ouganda et la République démocratique du Congo.
« À l’instar du tantale ou du tungstène utilisés dans l’électronique, l’or fait partie des “minerais du sang”. »
Pour autant, certains pays comme le Burkina Faso semblent fermer les yeux sur les impacts socio-environnementaux de l’extraction d’or en raison de la part du PIB qu’il représente. Par ailleurs, la Fondation FairTrade avance que 90 % des mineurs d’or exerceraient illégalement ou dans des petites exploitations et que 100 millions de personnes dépendraient de ces petites exploitations pour survivre. Difficile de rouler sur l’or dans ces conditions…

Comment redorer son image ?

Est-il possible de trouver un or responsable et durable ? On vous prévient tout de suite, la tâche est ardue ! Il est difficile d’établir la traçabilité de l’or, étant donné qu’il est souvent extrait en petites quantités et refondu avant sa mise en vente.
Quelques labels et certifications existent :
  • Le label Fairtrade garantit une extraction plus respectueuse de l’environnement ainsi qu’une rémunération décente pour les travailleurs. Toutefois, ce label ne certifie pas que l’intégralité des composants d’un bijou est d’origine Fairtrade (pdf).
  • Le label Fairmined Gold assure un or payé à un prix juste, un impact environnemental moindre, le respect des droits des travailleurs. Il remplit également d’autres critères éthiques, comme un salaire égal pour les hommes et les femmes.
  • Le label Fairmined Ecological Gold : le même que le précédent, avec interdiction d’utiliser du mercure et du cyanure. L’or est alors séparé du minerai par extraction gravimétrique.
  • La certification Chain of Custody du Responsible Jewellery Council garantit que la chaîne d’approvisionnement remplit certains critères environnementaux, mais surtout éthiques, comme l’absence de métal issu de zones de conflit.
L’Express a recensé 5 marques françaises de bijoux qui utilisent de l’or issu de l’un de ces labels.
Une alternative est de se tourner vers l’or recyclé. Eh oui, l’or de nos bijoux de famille peut facilement être refondu pour en créer de nouveaux, comme dans cette usine allemande. Le World Gold Council affiche d’ailleurs qu’en 2018, un quart de l’or produit dans le monde était recyclé. C’est le cas des prochaines médailles olympiques, comme on l’expliquait dans notre article sur les téléphones.

Les Astuces Carottes pour se dorer la pilule

  • Privilégier l’or recyclé ou certifié pour protéger l’environnement et les mineurs
  • Se tourner vers d’autres métaux moins polluants comme l’argent
  • Remettre au goût du jour les bijoux de famille, si l’on en a, plutôt que d’en acheter des neufs
Beau défi que de traiter ce sujet cette semaine, très complexe en termes de recherche documentaire. On a hâte d’avoir vos retours. En prime, c’est le retour du quizz !
On nous murmure aussi dans l’oreillette que vous pourrez nous rencontrer à la base la semaine du 19 août, plus d’informations bientôt !
Servane Courtaux, Elisa Autric, Alix Dodu & Laura Larrive
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