Hier, la Rédaction a profité d’un petit jour de repos pour faire la chasse aux œufs en chocolat. De quoi se régaler et achever en beauté une semaine de travail sur les œufs, les vrais !

La poule aux œufs d'or

Le 23 avril 2019
Hier, la Rédaction a profité d’un petit jour de repos pour faire la chasse aux œufs en chocolat. De quoi se régaler et achever en beauté une semaine de travail sur les œufs, les vrais !
Vignette de l'article La poule aux œufs d'or

Au commencement, il y avait l’œuf …

Nous avons eu le tournis quand nous sommes tombés sur le chiffre de la production d’œufs en France. Pas moins de quinze milliards d’œufs sortent des poulaillers chaque année ! Cela représente en moyenne 220 œufs par Français et par an.
« Quinze milliards d’œufs de poule sont produits chaque année par la filière avicole en France. »
Parmi ceux-là, on trouve :
  • 60 % d’œufs consommés tels quels, ceux que l’on achète entiers dans les boîtes en papier mâché
  • 40 % d’œufs incorporés dans ce que l’on appelle les ovoproduits : les préparations de l’industrie agroalimentaire comme la brioche ou la mayonnaise.
Regardons de plus près ce qui se passe dans notre assiette.
Le blanc d’œuf constitue une référence chez les nutritionnistes pour les protéines qu’il contient : de très bonne qualité, elles regroupent tous les acides aminés essentiels à notre bon développement. En revanche, la teneur en protéines de l’œuf reste inférieure à celle de la viande ou du poisson par exemple.
Le jaune, quant à lui, est une source de lipides et de vitamines. Sa couleur orangée est d’ailleurs due aux caroténoïdes (encore eux). Quant aux lipides, ils varient selon l’alimentation des poules. Certaines seront plus susceptibles d'avoir des jaunes riches en oméga-3 (comme le poisson) tandis que d’autres jaunes seront plus riches en oméga-6 (comme les noix et les huiles).
Pour finir, les œufs sont assez pauvres en calories, c’est donc un sans faute côté nutritif pour nos boîtes de douze !

Ah non, au commencement il y a la poule !

Il en faut, des poules, pour produire quinze milliards d’œufs par an ! Le cheptel français comptait en 2016 48,6 millions de poules pondeuses réparties dans 2100 élevages. Ceux-ci sont de plusieurs types, qui correspondent aux différentes catégories d’œufs marquées 0, 1, 2 ou 3 sur la coquille.
Catégorie Nombre de poules /m2 Lumière du jour Parcours extérieur
0 - Bio 6 oui 4 m2/poule
1 - Plein Air 9 oui 4 m2/poule
2 - Sol 9 non non
3 - Cage 13 poules non non

À noter les efforts de certains labels :
  • Le label Agriculture Biologique garantit une alimentation issue de produits de l’agriculture biologique
  • Le label Nature et Progrès limite à 4 poules par mètre carré la densité des élevages
Picoti, picota, 300 œufs et puis s’en va, c’est le triste refrain des poules d’élevage qui, après avoir réalisé leur “mission” pendant en moyenne 16 mois, voient leur capacité de ponte réduite et ne sont donc plus assez rentables. Elles sont par la suite envoyées à l’abattage pour être utilisées dans les préparations alimentaires. On parle de poules de réforme.
Quoi qu’il en soit, dans tous les modes de production, des atteintes au bien-être des animaux peuvent être relevées, telles que l’épointage (taille du bec) ou encore le broyage des poussins mâles qui n’est malheureusement pas une légende urbaine.
Pour faire des œufs commercialisables, non-fécondés, il faut des poules pondeuses. Pour obtenir ces poules (femelles), il faut faire éclore énormément d’œufs fécondés, puis séparer les mâles des femelles (le “sexage”). Les poussins mâles de cette espèce pondeuse, qui ne peuvent pas être élevés assez rentablement comme poulets de chair, sont mis à mort immédiatement après.
« Le broyage des poussins mâles est systématique dans l’élevage intensif des poules pondeuses. »
À ce sujet, l’entreprise allemande Seleggt a mis au point un procédé de sexage dans l’œuf, qui permet de trier mâles et femelles avant l’éclosion. Les œufs mâles sont alors réinjectés dans l’industrie pour leur jaune par exemple pour certains produits cosmétiques. Les œufs Seleggt sont déjà commercialisés dans certains supermarchés (avis à nos lecteurs frontaliers !).
En France, malgré le recul des parlementaires à ce sujet, l’entreprise Poulehouse s’engage également dans la recherche sur le sexage in ovo.

Des éleveurs qui battent de l’aile ...

À la suite de campagnes militantes telles celles menées par l’association L214, la demande des consommateurs évolue rapidement, ce qui pousse de plusieurs distributeurs à faire la promesse d’un retrait total des élevages en cage dans les prochaines années.
Le syndicat des producteurs d’œufs (CNPO) regrette cependant une contradiction entre ces promesses et la volonté de maintenir des prix similaires à ceux pratiqués actuellement. Le CNPO avance ainsi le chiffre de 500 millions d’euros à investir pour obtenir 50 % de conversion en élevage alternatif (c’est-à-dire hors cage) d’ici 2025.
C’est une somme importante pour un secteur déjà affaibli par les investissements nécessaires depuis l’application de l’interdiction dans l’Union Européenne en 2012 des cages dites “nues” (une cage grillagée et puis c’est tout). De nouvelles cages, dites “enrichies” (avec des perchoirs par exemple) ont été installées depuis, mais elles ne satisfont toujours pas les défenseurs des animaux.
Tout cela intervient dans un contexte de retard et de pertes de subventions pour les projets ruraux. Autant dire que, sans aides publiques, la fin des poules élevées en cage ne semble pas être pour bientôt.
« Sans aides publiques, les éleveurs de poules ne pourront pas ajuster leur production à la demande des consommateurs et aux promesses des distributeurs. »

... et ceux qui ont trouvé la poule aux œufs d’or !

Il existe cependant des agriculteurs qui réussissent la transition d’un modèle conventionnel en cage à un modèle biologique de manière individuelle, comme Jean-Louis Limousin.
Sur la plateforme Miimosa, qui soutient les projets d’agriculture en transition, on peut retrouver et soutenir des dizaines d’initiatives pour des élevages de poules sur le modèle bio.
Même si l’on ne se sent pas la fibre avicole, avoir une ou plusieurs poules chez soi, c’est possible et de plus en plus accessible ! De nombreuses poules de réformes sont en effet sauvées des abattoirs et données à l’adoption. On peut également en acheter ou en récupérer dans certaines communes.
Les poules permettent d’être autonome en œufs tout en allégeant ses poubelles. Gardons en tête que l’adoption d’une poule n’est pas à prendre à la légère : elles peuvent en effet vivre jusqu’à dix ans. Elles supportent même la vie sur un bateau, à l’image de Monique la poule.
Illustration
Guirec Soudée et sa poule Monique ont effectué le tour du monde en voilier en solitaire. Image : France3

Et l’environnement dans tout ça ?

Les cocottes n’émettent pas beaucoup de gaz à effet de serre, contrairement à leurs collègues les ruminants. En revanche il faut du grain pour nourrir tous ces volatiles, et, lorsqu’elles sont élevées en cage, ce grain vient parfois de loin.
Nous vous en parlions dans notre article sur les vaches, la plus grande partie du soja importé du Brésil par la France est utilisée pour nourrir la volaille (de chair et pondeuse), et notamment les 69 % des poules françaises. Cela représentait 2,3 millions de tonnes de soja en 2010, toutes poules confondues.
De fait, dans de multiples analyses cycle de vie d’un œuf menées en Suède, au Royaume-Uni ou aux Pays-Bas, la production des aliments destinés aux poules compte toujours pour au moins 60 % et jusqu’à 85 % des émissions de gaz à effet de serre, notamment à cause de la déforestation engendrée. Les autres sources de pollution de l’environnement incluent le transport ou la gestion des effluents.
L’association France Nature Environnement pointe quant à elle les limites du système actuel qui demande un constant renouvellement du cheptel de poules pondeuses, et les forts besoins en énergie que cela implique.
Les œufs font en revanche partie des produits alimentaires issus de l’élevage animal avec l’impact carboné le plus faible d’après BaseCarbone : entre 1,41 kgCO2eq/kg (œuf bio) et 2,31 kgCO2eq/kg (œuf poule élevée au sol) contre par exemple 2,14 kgCO2eq/kg poids vif de viande poulet en moyenne.

Une omelette sans casser des œufs ?

Une fois tous ces éléments en tête, comment s’assurer de profiter au mieux des œufs que l’on achète ? Pour assimiler le plus de nutriments et optimiser la digestion, l’idéal, d’après l’INRA, serait de les faire cuire mollet ou poché. L’occasion de tester cette recette facile.
« Aucun aliment n’est totalement indispensable par définition. La seule règle universelle en matière de nutrition c’est la variété et le plaisir ! - Anne, nutritionniste et membre de LundiCarotte »

Les AstucesCarotte pour aller se faire cuire un œuf

  • Pour apprendre quelques anecdotes caquetantes sur les poules, regarder cette vidéo de la chaîne Cervelle d’oiseau
  • Privilégier, dans l’ordre, les œufs de catégorie 0, 1 ou 2
  • Privilégier les ovoproduits qui comportent la mention “œufs de poules élevées en plein air”
  • Jouer au petit chimiste dans sa cuisine pour remplacer les œufs dans certaines préparations
  • Si l’on a un jardin ou un bateau, se renseigner sur les possibilités d’adopter une poule
Si vous n’avez pas eu la chance de déguster des œufs en chocolat ce week-end, c’est une raison de plus de participer à nos JeudiCarotte chaque semaine sur Facebook et Instagram pour gagner une tablette de chocolat !
Servane Courtaux, Anne Moreau et Laura Sereni
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