Cette semaine, on retourne en vacances et on file sous le soleil des îles pour se prélasser à l’ombre des cocotiers… ou presque.

Ambiance tropicale

Le 23 septembre 2019
Cette semaine, on retourne en vacances et on file sous le soleil des îles pour se prélasser à l’ombre des cocotiers… ou presque.
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Coco, quésaco ?

Comme les amandes, la noix de coco est en réalité le noyau du fruit du cocotier, ou Cocos Nucifera. Ce fruit n’est pas comestible, contrairement à l’intérieur de sa noix, la chair de coco.
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La noix de coco est le noyau du fruit du cocotier.
La dénomination “coco” proviendrait de l’équipage de Vasco de Gama : avec ses trois taches noires sur un côté, elle leur rappelait un crâne souriant et effrayant, dont l’étymologie portugaise est cocar pour grimacer. Avis aux lusophones !
Le cocotier pousse généralement dans les régions (co)côtières, car il a besoin d’eau, et notamment aux Philippines et en Indonésie, qui en est le premier producteur mondial avec dix-neuf millions de tonnes par an. Autant dire que la France peut aller se rhabiller avec ses 3 000 tonnes produites en 2016, principalement à la Réunion et à Mayotte.

Elle est partout

Copeaux, huile, lait, crème, eau… Jusqu’en 2015, on ne consommait en moyenne en Europe qu’un fruit par foyer tous les quatre ans (pdf). Malgré tout, force est de constater que ce fruit exotique s’immisce de plus en plus dans notre quotidien, la demande augmentant de 10 % par an (anglais).
En réalité, le principal sous-produit de la culture de coco reste l’huile de coco, qui peut être obtenue de deux manières :
  • En séchant la chair de coco au soleil ou dans des fours, on produit du coprah. Celui-ci est ensuite pressé, puis raffiné et traité avec des solvants à haute température afin d’éliminer d’éventuelles moisissures. Cette huile désodorisée, dite huile de coprah, constitue l’écrasante majorité de l’huile de coco produite dans le monde. Elle est utilisée par l’industrie agroalimentaire dans les biscuits, les glaces, la margarine, mais aussi les savons et les gels douche. Malheureusement, on la retrouve souvent sous des noms obscurs comme “huile végétale hydrogénée” dans les produits alimentaires ou “cocos nucifera” en cosmétique.
« L’huile de coprah raffinée et désodorisée utilisée par les industries cosmétiques et agroalimentaires représente la majorité de l’huile de coco produite dans le monde. »
  • En pressant la chair fraîche, on obtient du “lait de coco” dont on extrait la matière grasse : c’est l’huile dite vierge. Elle ne subit pas de traitements comme l’huile de coprah et préserve ainsi ses qualités nutritionnelles. La mention “extraite à froid“ signifie qu’elle est pressée sans recours à la chaleur, comme pour l’huile d’olive. Réservée à un usage domestique, on peut en trouver telle quelle dans les magasins, à un prix plus élevé que l’huile de coprah.
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Noix de coco séchant au soleil pour faire du coprah
Pour finir, mentionnons également que l’huile de coprah, comme l’huile de palme, est utilisée comme biocarburant dans certains pays. Elle n’est introduite pour l’instant qu’en petite quantité dans les mélanges diesel, pour ne pas encrasser les moteurs. Pour vous faire votre avis sur les biocarburants, nous vous proposons de relire notre article sur le sujet.

Les mille vertus des noix

Eau de coco, sucre de coco, lait de coco, huile de coco, on n’arrête plus le progrès. De nombreux articles vantent les bienfaits de ces produits : hydratation, système immunitaire, lutte contre le cholestérol. Nous avons mené l’enquête.
D’abord, rappelons que l’eau de coco, censée être hydratante, ne remplacera jamais un bon verre d’eau (du robinet si possible !). Dans certains cas, on peut même trouver du sucre et des exhausteurs de goût dans la liste des ingrédients. Une “vraie” eau de coco ne doit contenir que… de l’eau de coco !
Passons au sucre de coco et à une petite histoire d’enfumage. Riche en minéraux, il a longtemps été vanté comme plus sain que le sucre blanc en raison de son index glycémique (IG) de 35, très faible. Pourtant, une étude récente de l’Université de Sydney réfute ce chiffre émanant des autorités philippines en chiffrant l’IG réel du sucre de coco à 54, soit presque autant que le sucre blanc, à 60. Ce petit coup d’esbroufe a tout de même permis de doper les ventes du sucre magique.
Concernant l’huile de coco, seule l’huile vierge de coco présente potentiellement des bénéfices. Qu’elle soit de coprah ou vierge, elle est dans tous les cas extrêmement riche en graisses saturées. Problème : ces graisses saturées sont déjà trop présentes dans notre alimentation d’après l’OMS, notamment dans les aliments préparés.
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L’huile de coco est très riche en acides gras saturés, image présentée et expliquée dans notre article sur l’huile d’olive
Selon le British Bulletin of Nutrition, l’huile de coco permettrait de lutter contre des maladies comme Alzheimer grâce à la présence de phénols, comme dans le thé. L’huile vierge en contiendrait d’ailleurs jusqu’à sept fois plus que l’huile de coprah. En revanche, ses teneurs en certains phénols (acide félurique, catéchine ou acide camourique) restent entre 100 et 200 fois plus faibles que celles du pain complet, du cacao ou des dattes séchées.
En outre, l’huile de coco vierge a des avantages dans la salle de bains, notamment grâce à son acide laurique. Elle est antibactérienne et antivirale.
Pour finir, les produits frais comme le lait de coco doivent être pasteurisés - chauffés entre 60 et 90 degrés pendant quelques minutes - pour durer plus longtemps. Ce processus entraîne parfois une dégradation d’une partie des nutriments. La flash-pasteurisation peut être utilisée pour pallier partiellement ce problème.
Le bilan santé est donc mitigé pour la noix de coco.

Le papy-boom des cocotiers

Malgré une demande en constante augmentation, les producteurs de noix de coco ont du mal à suivre la cadence. Un cocotier met en effet 10 à 30 ans avant d’atteindre son potentiel productif maximal (qui tourne autour de 150 noix de coco par an), et peut vivre jusqu’à 100 ans.
Les projecteurs ayant été tournés longtemps vers le palmier à huile, les plantations de coco sont vieillissantes. Aujourd’hui, on estime par exemple que 20 % des cocotiers des Philippines ne sont plus fertiles, car plantés juste après la Seconde Guerre mondiale.
Pour produire plus et plus vite, les fermiers doivent donc se débarrasser des cocotiers trop vieux pour les remplacer par des nouveaux, hybrides (anglais), ou alors développer leur production sur d’autres terrains quand ils en ont la possibilité. Résultat : pour le moment, la production augmente seulement de 2 % par an.
« En un an, la production de noix de coco n’augmente que de 2 % tandis que la demande croît de 10 %. »
Ce développement de la culture de la coco n’est pas sans impact sur les écosystèmes (anglais). En effet, leurs feuilles trop coupantes et leurs troncs nus sont délaissés par les oiseaux côtiers, qui n’apportent par conséquent plus à la terre les nutriments contenus dans leurs fientes. Les plantes alentour manquent alors de qualités nutritionnelles et les animaux qui s’en nourrissaient s’en vont ripailler ailleurs.
Côté déforestation, une étude (pdf) de la Commission européenne annonçait qu’entre 1998 et 2008, la consommation de noix de coco était responsable de 2,5 % de la déforestation de l’Indonésie liée aux importations de l’UE et moins de 1 % dans les autres régions forestières. Cela reste peu par rapport au secteur du soja (plus de 50 % de la déforestation mondiale liée à l’UE) ou au secteur du palmier à huile (12 %). De son côté, l’ONG Sauvons la forêt met en garde industriels et consommateurs : l’huile de coco ne doit pas suivre le chemin de l’huile de palme et l’on devrait préférer les huiles produites localement.
Concernant l’empreinte carbone liée à l’importation de produits à base de noix de coco, nous n’avons pas trouvé de données spécifiques. Comme pour beaucoup de denrées transportées en bateau, ce sont souvent les derniers kilomètres jusqu’aux zones de vente qui sont les plus impactants, comme nous l’expliquons dans notre article sur le transport de marchandises. Le comparateur Etiquettable indique quant à lui des émissions de 800 g CO2eq par kg de noix de coco. C’est 10 fois plus que certains fruits français.

Des singes et des hommes

En Asie, il semble que 70 % de la production de noix de coco provient de petites exploitations familiales.
D’après la National Anti-Poverty Commission, un fermier philippin perçoit en moyenne 41 pesos philippins par jour, ce qui correspond à 0,78 dollar américain. C’est bien en dessous du seuil d’extrême pauvreté de 1,90 dollar par personne et par jour défini par la Banque Mondiale.
Par ailleurs, la culture de la noix de coco ne peut pour le moment pas être mécanisée. Elle se fait parfois à l’aide de singes, qui peuvent récolter jusqu’à 1 600 noix de coco par jour (anglais), contre 80 à 100 pour des humains.
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Un macaque et sa noix de coco. Image Dmitry Chulov / shutterstock.com
Les conditions de vie de ces petits singes sont l’objet de vives discussions. Si l’on admet parfois qu’elles respectent le bien-être animal, elles sont parfois qualifiées d’esclavage (anglais). Notons que peu de sources existent sur la réalité de ces pratiques agricoles. Certaines avancent, par exemple, que 99 % des noix de coco thaïlandaises seraient cueillies par des singes.
« Certaines sources avancent que 99 % des noix de coco thaïlandaises seraient cueillies par des singes. »
Néanmoins, certaines marques connues en France comme Aroma-Zone, Bjorg ou Léa Nature ont déclaré ne pas commercer avec des producteurs faisant travailler des animaux.

Les AstuceCarotte pour ne pas cocoter

  • Privilégier l’huile de coco vierge extraite à froid à l’huile de coprah, aussi vendue sous le nom “d’huile de coco désodorisée”
  • De manière générale, limiter sa consommation de produits à base de noix de coco, qui viennent de loin, et préférer des alternatives végétales locales comme les boissons au soja ou au riz français.
  • Favoriser les achats labellisés commerce équitable ou agriculture biologique.
Nous lançons une catégorie “Recommandations” sur le site, qui permettra le partage de ressources en rapport avec la consommation durable. Livres, podcasts, sites, journaux : pour soumettre une recommandation, rien de plus simple, c’est par ici.
Dans la même veine, nous organisons la quatrième Soirée Carotte le lundi 2 octobre sous forme de café littéraire. C’est l’occasion de présenter et d’échanger sur les ouvrages qui vous ont permis de réfléchir ou de modifier vos habitudes de consommation. On espère vous voir nombreux. Plus d’infos à venir !
Elisa Autric, Servane Courtaux et Garance Régimbeau
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