C’est le printemps ! Les oiseaux chantent, le ciel est bleu et les abeilles commencent à s’affairer autour des fleurs. L’occasion pour nous de signer un nouveau numéro sur le miel, les abeilles et les pollinisateurs en général ! Bonne lecture ! Le sondage de la semaine dernière a parlé, les sources sont de retours en liens orange dans le corps du mail. Nous mettons aussi en place une rubrique “Pour aller plus loin”, accessible dans les versions mail et web, qui contient les rapports scientifiques et outils que nous recommandons pour une meilleure compréhension du sujet.

Le Jaune et le Noir

Le 25 mars 2019
C’est le printemps ! Les oiseaux chantent, le ciel est bleu et les abeilles commencent à s’affairer autour des fleurs. L’occasion pour nous de signer un nouveau numéro sur le miel, les abeilles et les pollinisateurs en général ! Bonne lecture !
Le sondage de la semaine dernière a parlé, les sources sont de retours en liens orange dans le corps du mail. Nous mettons aussi en place une rubrique “Pour aller plus loin”, accessible dans les versions mail et web, qui contient les rapports scientifiques et outils que nous recommandons pour une meilleure compréhension du sujet.
Vignette de l'article Le Jaune et le Noir

J’en prends juste une cuillère

La France compte près de 50 000 apiculteurs, dont 2 000 professionnels qui constituent une filière spéciale de l’agriculture française. Cette production découle de différentes espèces de fleurs, comme le montre ce graphique de FranceAgriMer.
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L’origine fleurie des miels produits en France. Source : franceagrimer.fr
Sa production annuelle fluctuant autour de 16 000 tonnes, la France est pourtant obligée d’importer massivement pour subvenir à la demande (45 000 tonnes sont consommées chaque année). Le miel importé est espagnol, chinois, ukrainien ou encore argentin.
Réputé pour ses vertus aseptisantes, stimulantes, cicatrisantes, moins mauvais que le sucre blanc, le miel et son utilisation dans beaucoup de médicaments faits maison semble faire l’unanimité. Pour autant, il ne faut pas oublier qu'il reste un sucre.
Le miel a bien un indice glycémique plus faible que le sucre blanc, mais sa teneur en sucre reste élevée, de l’ordre de 80 %. Pour rester dans les clous de l'Organisation mondiale de la santé, il s'agirait de ne pas dépasser les 50 grammes de sucres ajoutés par jour (sans compter ceux des fruits frais) et, idéalement, moins de 25 grammes. 25 grammes de sucre, cela représente seulement quatre cuillères à café de miel. N’ayons donc pas la main trop lourde !
« Malgré ses bienfaits notables, n’oublions pas que le miel est avant tout constitué de sucre. »

L’abeille et son berger

Parmi les 20 000 espèces d’abeilles dans le monde, l’abeille européenne, de son petit nom apis mellifera, est la plus connue des pollinisateurs. Elle vit en colonie de 40 000 à 80 000 individus en été, dont la reine, seule femelle féconde, et différentes castes sociales (ouvrières et faux bourdons). La taille des exploitations apicoles françaises varie de 1 à plus de 300 ruches.
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La répartition des ruches et des apiculteurs en France, via ADA France, la Fédération des apiculteurs
Alors, comment se déroule la récolte du miel ? Au printemps, les butineuses quittent la ruche pour aller sur des fleurs. On estime qu’une abeille butine plusieurs milliers de fleurs par jour dans une zone située dans un rayon allant de 3 à 5 kilomètres autour de sa ruche. C’est grâce à cette estimation que l’on peut parler de miels d’acacia, de châtaignier ou encore de lavande.
À leur retour à la ruche, les butineuses régurgitent le précieux nectar aux abeilles receveuses qui, en s’échangeant cette nourriture entre elles, produisent une enzyme qui transforme le saccharose en glucose et en fructose. Puis, elles le déposent dans les alvéoles. L’eau du nectar s’évapore, jusqu’à ce que celui-ci n’en contienne plus que 18 %. Le miel est alors prêt, l’alvéole est recouverte d’un couvercle de cire.
Une fois la floraison terminée, l’apiculteur récupère les cadres pour racler la cire superficielle et extraire le miel.
« L’impératif de l’apiculteur respectueux est donc de ne prendre à une ruche que son surplus de miel. »
Mais l’abeille consent-elle à lui donner son miel ? Si de nombreuses études ont été réalisées, les avis divergent encore sur la question : quand certains vantent un “échange de services”, d’autres dénoncent un “vol” ou une “exploitation”. Il faut dire que la science est encore très incertaine à propos de ce qu'il se passe dans la tête d'une abeille : souffrent-elles de constater qu'on vide leurs réserves ? Ce qui est sûr toutefois, c’est que les abeilles ont besoin de leur miel pour se nourrir et survivre. L’impératif de l’apiculteur respectueux est donc de ne prendre à une ruche que son surplus de miel.
Afin de garantir une bonne santé aux abeilles, les apiculteurs leur donnent des suppléments en sucre, vitamines et pollen au printemps sous forme liquide et pendant l’hiver sous forme solide (le candi). La faim n’est pourtant pas le seul danger qui menace les abeilles.

Les abeilles sont-elles en danger ?

Le déclin des abeilles est l’un des sujets potentiellement anxiogènes qui fait régulièrement les choux gras des médias. Pourtant, l'abeille domestique que l'on connaît ne fait pas partie de la liste des espèces menacées d'extinction.
En revanche, il est vrai que le nombre de ruches françaises a diminué depuis les années 1980.
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Parmi les potentielles causes de ce déclin : les néonicotinoïdes, un insecticide utilisé pour protéger les plantes. Les effets néfastes de ces produits sur les abeilles sont démontrés en laboratoire : quand ils ne les tuent pas, ils s'attaquent à leur système nerveux, les désorientent et les empêchent de retrouver le chemin de la ruche. Pour autant, il subsiste encore de grosses incertitudes sur la manière dont ces produits impactent les abeilles en conditions réelles. Par exemple, on ignore encore ce qui définit un niveau réaliste d'exposition aux pesticides, ainsi que les effets à long terme de ces produits sur les abeilles. Les recherches sont donc en cours.
La recherche a tout de même su identifier les quatre causes principales de la diminution du nombre d’abeilles : l’appauvrissement de l’environnement en termes de ressources alimentaires, l’augmentation des maladies qui touchent les abeilles (notamment le parasite varroa venu d’Asie), la pollution (de l’air ou par les pesticides) et enfin, les pratiques de certains apiculteurs. Il est cependant difficile de hiérarchiser ces causes.

Les abeilles et la pollinisation

L'autre enjeu lié aux abeilles, c'est la pollinisation. Celle-ci est importante pour le rendement et la qualité de nombreuses cultures. Plus des trois quarts des principales sources de nourriture de l'humanité en dépendent, au moins en partie, c'est dire ! En termes de valeur marchande, on estime également qu'entre 5 et 8 % de la production agricole mondiale est directement attribuable à la pollinisation.
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Les bourdons, très menacés, sont encore plus mignons que les abeilles, d’après Servane
Cependant, les abeilles ne sont pas les seules à s'occuper de cette affaire : la grande majorité des pollinisateurs sont sauvages (abeilles non domestiques, mouches, papillons, guêpes, certains oiseaux et chauves-souris…). Ils sont utiles à la pollinisation même lorsque des espèces domestiques comme l'abeille sont présentes en grande quantité et un récent rapport de l'IPBES affirme que la contribution de ces pollinisateurs sauvages est régulièrement sous-estimée. Par exemple, en Grande-Bretagne, les abeilles à miel ne sont responsables que d’un tiers de la pollinisation. La FAO souligne d’ailleurs en 2016 que 16 % des pollinisateurs vertébrés sont menacés d’extinction et ce chiffre grimpe à 40 % pour les invertébrés (insectes notamment).
La prestigieuse revue Science a même publié un avertissement concernant le déploiement à grande échelle de ruches d'abeilles : dans certains cas, une trop forte concentration d'abeilles domestiques nuirait aux populations de pollinisateurs sauvages. Des densités d'abeilles domestiques trop importantes créeraient en effet une compétition malvenue.
« Les abeilles domestiques ne sont pas les seules à se frotter dans le pollen : la grande majorité des pollinisateurs sont sauvages. »
Parmi les mesures bénéfiques aux pollinisateurs de tous poils : l'entretien d'un jardin potager et la création d'habitats naturels (hôtels à insectes, jachères fleuries, …).

Retour au rayon miel

Pour choisir les produits que nous achetons, rien de mieux que de regarder l’étiquette ! Pour le miel, ça se corse un peu : « mélange de miels originaires de l’UE » voire « mélange de miels originaires de l’UE et hors UE », difficile de faire plus imprécis ! En effet, la législation sur le sujet est peu stricte et c’est uniquement lorsqu’il provient d’un pays et d’un seul que c’est précisé.
Le flou artistique se retrouve également sur le plan de la composition. Le miel est censé être composé uniquement … de miel. Si les laboratoires de lutte contre la fraude tentent de démasquer des falsifications, comme l’ajout de sirop de sucre industriel, il leur est difficile de pointer du doigt une marque, puisqu’un pot de miel est souvent issu de différents lots.
En effet, même lorsqu’il est produit en France, le miel provient rarement d’un unique apiculteur, mais des lots de plusieurs d’entre eux réunis par un conditionneur. Ces miels industriels sont moins intéressants, car ils sont chauffés à des températures qui dénaturent le nectar.
Les niveaux de pesticides trouvés dans le miel ne présenteraient pas de risques pour l'homme. Néanmoins, on peut acheter du miel bio, qui garantit qu'au moins 50 % des fleurs butinées sont issues de l'agriculture biologique.
Si on a la chance de connaître des apiculteurs amateurs ou d’avoir accès à un marché de producteurs, on peut acheter directement son miel sans passer par un intermédiaire. Ce type de vente en circuit court représente environ 30 % des ventes de miel en France.
Enfin, pour les emballages, on préférera les bocaux en verre qui sont infiniment recyclables (les producteurs amateurs acceptent souvent volontiers de les récupérer pour les réutiliser).

Les AstucesCarotte pour butiner durablement

  • Consommer du miel artisanal et local
  • Répliquer “... Et les bourdons !” lorsqu'un ami vous affirme qu’il faut sauver les abeilles
  • Si on dispose d’un jardin, ne pas hésiter à y planter des espèces mélifères qui fleurissent en début (comme la pervenche) ou en fin de saison (comme le lierre) pour aider les abeilles à se nourrir.

Pour aller plus loin

  • Les informations sur les pollinisateurs viennent du fascinant "Rapport d'évaluation sur les pollinisateurs, la pollinisation et la production alimentaire", publié par l'IPBES (Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques). C'est une très bonne ressource pour approfondir ses connaissances sur le sujet !
  • Comme souvent, les informations chiffrées sur la production et la consommation viennent de la fiche récapitulative de FranceAgriMer. Une très bonne source bien illustrée et mise à jour sur tous les produits issus de l’agriculture française (animaux comme végétaux).
On espère que cet article ne vous aura pas donné le bourdon !
Thaïs Brunel, Servane Courtaux et Paul Louyot
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