Comment prendre soin durablement des dents qui nous servent à mâcher nos carottes ? Après avoir rédigé un certain nombre de numéros sur des produits alimentaires, nous enquêtons aujourd’hui sur le duo gagnant de l’hygiène bucco-dentaire : la brosse à dents et le dentifrice.

Un peu de fraîcheur

Le 6 mai 2019
Comment prendre soin durablement des dents qui nous servent à mâcher nos carottes ?
Après avoir rédigé un certain nombre de numéros sur des produits alimentaires, nous enquêtons aujourd’hui sur le duo gagnant de l’hygiène bucco-dentaire : la brosse à dents et le dentifrice.
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Une plastique irréprochable, épisode 2

Les estimations sur le nombre de brosses à dents achetées en France varient entre 90 millions et presque 300 millions selon les sources. En supposant que tous les Français se brossent les dents et qu’ils remplacent leur brosse à dents en moyenne tous les six mois (les dentistes recommandent tous les trois à quatre mois), cela fait tout de même plus de 100 millions de brosses à dents jetées chaque année.
« Entre 90 et 300 millions de brosses à dents finissent dans les décharges chaque année en France faute de recyclage. »
La plupart des brosses à dents vendues dans le commerce sont constituées de plastique, un dérivé du pétrole. On leur ajoute des poils en nylon, un autre type de plastique, qui sont fixés au manche à l’aide de colle ou de métal.
D’après Citeo, organisme majeur du recyclage en France, la moitié des déchets plastiques serait incinérée pour produire de l’énergie, un quart serait recyclé et le reste finirait à la décharge. La brosse à dents en plastique fait malheureusement partie de cette dernière catégorie.
Ce qui pose problème, c’est le nombre de matériaux différents qui constituent ce si petit objet : différents plastiques pour le manche et un mélange de nylon et de métal pour la tête. Pour recycler le plastique de sa brosse à dents, jusqu’à présent, il n’y avait qu’une seule solution : couper la tête.
Illustration
Pour le recyclage des brosses à dents : il faut couper la tête. Planche détournée de Tintin et le Lotus Bleu, éditions Casterman
Pas si vite ! Depuis un mois, l’entreprise TerraCycle, spécialisée dans le recyclage de produits complexes, a lancé un partenariat avec Signal pour organiser des collectes de brosses à dents en plastique. Une carte des points de collecte est disponible ici.

Lavage à 8 000 tours par minute

Les plus attachés à l’hygiène de leurs dents auront peut-être investi dans une brosse à dents électrique. Même si elle offre l’illusion de ne pas générer beaucoup de déchets (on change seulement la tête de temps en temps), cette brosse à dents traîne derrière elle un long sillage de matières premières comme beaucoup de produits électroménagers, comme le rappelle Julien Vidal (vidéo), du blog Ça commence par moi.
Que faire en fin de vie de votre brosse à dents électrique ? Même réponse que pour les autres DEEE (déchets d’équipements électriques et électroniques) : les déposer dans un point de collecte. Le site Eco Systèmes propose  : il suffit de choisir le type d’objet électronique et sa ville.

Pas touche à mon panda

Face à cette énorme consommation de plastique, on commence à voir émerger sur le marché un autre type de brosse à dents, réputé plus durable : la brosse à dents en bambou.
Le bambou est une plante très intéressante du point de vue écologique. Il pousse très rapidement, 20 mètres en cinq ans, et fixe 30 % plus de carbone que ses congénères feuillus. Plus encore, son système racinaire n’endommage pas les sols et son feuillage clairsemé laisse ruisseler davantage d’eau de pluie à terre.
En revanche, suite au succès commercial des accessoires, meubles et vêtements en bambou, les plantations certifiées durables n’arrivent plus à satisfaire le marché. On se tourne alors vers de grandes bambouseraies intensives qui causent déforestation, érosion des sols et perte de biodiversité.
« Le bambou est un matériau durable, mais son exploitation intensive se fait au détriment des écosystèmes. »
Retour dans la salle de bains. En fin de vie, on peut composter sa brosse à dents en bambou. Méfiance cependant concernant la tête et les poils de ces brosses qui sont parfois vendues comme biodégradables sans l’être réellement (en anglais). Là encore, en cas de doute, il faut couper la tête !
Au cours de nos recherches, nous avons trouvé plusieurs mentions “sans pesticides”, “ne participe pas à la déforestation” ou “bambou moso non consommé par les pandas”, mais aucune certification officielle des marques vendues en France.

Les brosses à dents réutilisables

D’autres entreprises proposent des brosses à dents à têtes amovibles. Ainsi, on réduit considérablement la quantité de déchets générés. La marque française Caliquo a ainsi créé deux modèles : en bois noble (noyer, chêne) ou en bioplastique. Les premières sont assez onéreuses et se gardent à vie tandis que les secondes sont très abordables. Elles sont fabriquées intégralement en France.
Voici l’avis de l’un des colocataires de Servane, qui utilise l’une de ces brosses en bioplastique depuis un mois : malgré une conception qui tranche par sa simplicité par rapport aux brosses à dents conventionnelles, elle fait le travail. D’autres témoignages font état d’un manque de souplesse des poils de certaines brosses de ce type. Avis aux gencives sensibles !
Ça y est, nous sommes presque parés au brossage, vient maintenant le moment de choisir son dentifrice.

Pâte à dents

Le dentifrice, ou pâte à dents, comme disent nos amis québécois, a pour rôle principal de supprimer la plaque dentaire. Composée protéines salivaires, d’aliments et de bactéries, celle-ci de se dépose à la surface des dents et est à l’origine de nos maux. Les agents abrasifs, comme le carbonate de calcium, sont chargés de l’élimination de la plaque et constituent 30 à 50 % du dentifrice.
Certains dentifrices se vantent également de protéger l’émail des dents, de leur donner une couleur plus blanche, de purifier l’haleine et pour cela, ils sont composés d’une foule d’autres produits chimiques, comme le fluor.

Panique sur la paillasse

Si l’on jette un œil à la liste de ces ingrédients, difficile de s’y retrouver dans ce méli-mélo de noms abstraits. La toxicité de certains d’entre eux est discutée au sein de la communauté scientifique :
  • Le sodium lauryl sulfate, dont on vous parlait déjà dans notre article sur le savon, donne un effet moussant. Il est accusé de rendre l’intérieur de la bouche plus vulnérable, mais les études à ce sujet se contredisent.
  • Le triclosan est un antibactérien. Il est également reconnu comme perturbateur endocrinien dangereux pour nous, mais également pour les espèces aquatiques via les eaux usées.
  • Le dioxyde de titane est un colorant blanc utilisé dans le dentifrice, mais aussi dans certains aliments. La France a prévu de bannir son utilisation dans les aliments cette année en raison de sa cancérogénicité. Les dentifrices ne sont pas concernés par cette interdiction, puisque l’on n’est pas censé les avaler.
Quant au fluor, c’est l’un des produits phares de nos dentifrices. Il renforce l’émail dentaire et combat les caries (en anglais). Le fluor a fait couler beaucoup d’encre : il présente des risques d’intoxication et d’empoisonnement, mais les accidents n’arrivent que suite à l’ingestion d’une grande dose d’un coup.
Contrairement aux produits précédents, qui ont surtout des vertus d’apparat (mousse, couleur, parfum…), le fluor est très bon pour nos dents.
« Les dentistes s’accordent pour dire que les bénéfices du dentifrice dépassent de loin leurs supposés effets négatifs »
D’après la plupart des dentistes (dont les parents de Thaïs), les problèmes dentaires pouvant entraîner des cancers ou des maladies cardiovasculaires, les bénéfices du dentifrice compensent très largement leurs effets négatifs supposés.

Des remèdes maison

Pour qui ne serait pas convaincu par cet argument, des alternatives existent pour se laver les dents, comme le dentifrice bio, le plus connu étant le dentifrice Vademecum. Celui-ci est composé d’un mélange de plantes et de produits bénéfiques pour l’entretien des dents. Il est dépourvu de ses atours chimico-commerciaux, mais pourrait rebuter un néophyte par son goût et sa texture qui ne mousse pas. Pourtant, il ne faut pas s’arrêter à la première impression : tous les témoignages attestent qu’on s’y habitue très rapidement.
En revanche, à l’instar de ses collègues classiques, il génère des déchets plastiques non-recyclables jusqu’à présent. En France, cela représenterait presque 200 millions de tubes par an. Heureusement, la collecte Terracycle évoquée plus haut concerne également les tubes de dentifrice. Il existe également des dentifrices solides, dits “zéro déchet”, que l’on trouve en magasins bios et épiceries en vrac.
Par ailleurs, les petites recettes de dentifrice maison reviennent au goût du jour : bicarbonate de soude ou encore dentifrice à l’argile et au charbon. Ces alternatives nécessitent peu d’ingrédients et sont vantées pour leurs bienfaits pour les dents.
Pourtant, ce sont des produits abrasifs qui, certes, élimineront les éventuelles taches, mais qui, à la longue, rongent également l’émail. On constate rapidement que les dents jaunissent à nouveau ! Rappelons que les dents ne sont pas censées être blanches, mais que leur couleur varie entre le jaune et le gris, selon les personnes. Il n’est donc pas possible de les “blanchir” facilement, mais on peut éviter certains aliments qui les tachent . Il est recommandé d’avoir recours à ces produits de manière ponctuelle, les dentistes conseillent une fois par semaine, et de privilégier le bicarbonate de soude, solution la moins abrasive.

Les AstucesCarotte pour brosser durable

  • Avant de jeter sa brosse à dents, quelle qu’elle soit, si on n’en a plus l’utilité dans la salle de bains, on peut lui offrir une seconde vie pour le ménage !
  • Se renseigner sur les points de collecte des brosses à dents en plastique (qui collectent également les tubes de dentifrice).
  • Pourquoi ne pas essayer un modèle en bambou ou à tête interchangeable ?
  • Si l’on souhaite se passer de dentifrice industriel habituel, opter pour un modèle bio plutôt que pour un dentifrice fait maison, souvent trop abrasif pour une utilisation quotidienne.
  • Bien se brosser les dents trois minutes après chaque repas.
Pour conclure, l’une de nos lectrices nous a mentionné une solution totalement alternative : le Siwak. Ce bâton, que l’on mâchouille de temps en temps, pourrait bien se substituer à nos brosses à dents habituelles. Pour les plus aventuriers d’entre nous.
Servane Courtaux et Thaïs Brunel
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