Chers lecteurs et chères lectrices, cette semaine, nous allons nous pencher sur un sujet énergique : les fournisseurs d’électricité.

Un article électrique

Le 18 octobre 2021
Chers lecteurs et chères lectrices, cette semaine, nous allons nous pencher sur un sujet énergique : les fournisseurs d’électricité.
Vignette de l'article Un article électrique

Les fourniquoi ?

Commençons par le commencement : d’où proviennent tous ces petits électrons qui allument nos ampoules ? Nous avons d’abord le producteur : c’est lui qui est propriétaire des usines qui fabriquent l'électricité telles que les centrales à charbon, hydrauliques, nucléaires, solaires ou encore à vent. Ces producteurs vendent leur électricité à prix “de gros” à des fournisseurs d’électricité, qui, eux, nous la revendent à prix “consommateur”. Une fois vendue, c’est le distributeur d’électricité (en France, le duo RTE/Enedis a le monopole) qui achemine les précieux électrons via les lignes à haute tension jusque chez nous.
Tout ce que nous décrivons là est relativement nouveau. Jusqu’en 2007, EDF était le seul producteur d’électricité de France et le seul fournisseur. C’est une directive européenne de 1996 qui initie la dynamique d’ouverture à la concurrence pour faciliter les échanges d’électricité entre pays européens. Depuis, fleurissent en France de nombreuses nouvelles entreprises. Aujourd’hui, on compte 41 fournisseurs d’électricité, lesquels se distinguent essentiellement par deux choses : les producteurs d’électricité auxquels eux-mêmes achètent leur électricité en gros et les types de contrats et services associés qu’ils nous proposent.
Dernière précision : certains producteurs d’électricité sont aussi fournisseurs et vice-versa. C’est par exemple le cas de Total, d’EDF, d’Engie… d’autres fournisseurs d’électricité sont exclusivement fournisseurs et peuvent soit choisir d’acheter un peu d’électricité à tout le monde, soit choisir d’en acheter spécifiquement à certains producteurs. On peut donc distinguer trois types de fournisseurs que nous appelons les fournisseurs-producteurs, les fournisseurs-tout-venant, les fournisseurs-traçabilité.

Petit zoom sur la production d’électricité en France

En 2020, les usines d'électricité installées en France ont produit 500 milliards de kWh. Ce chiffre ne vous parle peut-être pas beaucoup. Sachez juste que c’est 10 % de plus que les besoins de consommation française. Les 10 % restants sont exportés à nos voisins européens. Parmi les moyens de produire de l’électricité (les différents types de centrales), on distingue traditionnellement trois familles :
  • Les centrales à énergie fossile (gaz, pétrole et charbon) : ce sont les plus utilisées historiquement, mais globalement, tout le monde essaye de s’en passer le plus possible du fait des émissions massives de gaz à effet de serre qui en résultent 
  • Les centrales nucléaires : massivement déployée en France dans les années 1970, cette énergie émet peu de carbone, mais constitue un défi industriel de taille (risque, traitement des déchets, coût…) et fait à ce titre-là débat (confer notre article dédié
  • Les moyens de production d’électricité via les énergies renouvelables : hydraulique (les barrages), solaire (les panneaux), éolienne (les hélices), les biocarburants (issus de plantes agricoles) et géothermique (issus de la chaleur de la Terre)… Ces moyens de production sont peu émetteurs de GES, mais ils constituent également des défis industriels importants de par leur intermittence (on ne peut pas compter toujours dessus), leur encombrement important de l’espace, leur coût, etc. 
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La production électrique en 2020- Hello Watt
Ci-dessus, vous pouvez observer la production d’électricité en France : 8 % d’énergies fossiles, 67 % de nucléaire et 25 % d’autres moyens décarbonés (contre 83 %, 4 % et 13 % en moyenne dans le monde)
Nous avons donc trois grandes familles. Nous disions plus avant que les fournisseurs se distinguaient les uns des autres par la typologie des moyens de production auxquels ils nous “raccordent”.
L’association Greenpeace fait un travail de recensement des moyens de production de chaque offre de fournisseur. Nous ne sommes pas d’accord avec les conclusions qu’ils en tirent (notamment sur le nucléaire, nous y reviendrons), mais le recensement mérite tout de même le coup d'œil : → par ici.
Alors, comment interpréter cela ?

Par rapport aux énergies fossiles, déjà

Tout d’abord, concernant les énergies fossiles, il nous semble que tout le monde convient qu’il faudrait s’en passer au maximum et ne s’en servir que lorsque l’on n’a pas le choix.
Pour ajouter un peu de pression, il nous paraît toutefois utile de ne pas acheter son électricité auprès d’un fournisseur-producteur qui possède des centrales à énergies fossiles, comme c’est le cas de TotalEnergies, Engie Happe, Eni, Vattenfal, et Iberdrola.
Note : EDF se trouve aussi dans cette situation, mais nous reviendrons plus loin sur ce cas.

Ensuite, le fameux débat : nucléaire versus “le reste”

Le débat principal porte donc sur le choix entre le nucléaire et un panachage plus ou moins spécifique de tout le reste (ni fossile, ni nucléaire)
Pour notre part, chez LundiCarotte, nous pensons qu’au stade où nous en sommes, l’énergie nucléaire et les autres énergies décarbonées méritent toutes de continuer à être explorées, notamment dans la perspective de la lutte contre le changement climatique. Elles présentent toutes des défis, pour lesquels les filières ont de larges marges de progression… En première lecture, nous sommes donc favorables au développement d’une combinaison de ces deux solutions.
En seconde lecture, nous pourrions dire que comme le nucléaire occupe déjà une large place dans le mix énergétique actuel (67 %), être favorable à un mélange se traduit à court terme par favoriser le développement d’autres énergies que le nucléaire.
En troisième lecture à présent (c’est la dernière !), précisons un élément de contexte important : si aujourd’hui, en effet, l'énergie nucléaire représente 67 % du mix électrique français, par effet de vieillissement du parc de centrales, ce pourcentage est amené à baisser drastiquement dans les années à venir. Aussi, nombreux sont les partisans (et nous en sommes) de lancer un programme industriel de renouvellement du parc nucléaire français. En effet, retarder le démarrage de ce programme, c’est prendre un risque croissant d’être pris de court dans le futur et de devoir lancer “en catastrophe” des centrales à énergies fossiles (et donc fortement carbonées) pour répondre à la demande (nous reviendrons plus loin sur cet enjeu important qu’est “la demande”). Vous nous direz : “C’est un peu loin des préoccupations directes d’un consommateur, tout ça”. Le fait est qu’il nous semble que l’opinion publique pèse pour beaucoup dans l’immobilisme sur le sujet. Dans ce contexte, il nous paraît donc pertinent de soutenir la filière nucléaire en choisissant EDF comme fournisseur d’électricité.
Voilà pour notre avis.
Après, pour être transparent, EDF, de par son ancienne position de monopole, n’est pas en rade de clients et dispose approximativement des trois quarts du marché français. Votre soutien sera de l’ordre de la symbolique. Disons que c’est un pied de nez à une prise de position “antinucléaire” fréquente de fournisseurs “verts” qui fonctionnent pour quelques pourcents du marché, mais dont la capacité à remplacer les 67 % nucléaire français est pour l’instant plus que douteuse.

Un modèle ou plusieurs modèles ?

Maintenant, apportons tout de même une nuance : observons qu’il y a une différence franche entre EDF, entreprise dont le monopole est historique, propriétaire de 19 centrales nucléaires, d’une flopée de barrages hydroélectriques et d’une myriade d’autres usines à électricité diverses… et un agriculteur qui a mis une éolienne sur son champ et qui vend son électricité. Disons que ce sont deux modèles bien différents.
LundiCarotte ne sait pas vous dire quel modèle est mieux que l’autre. De par l’importance vitale et stratégique du secteur, il est quelque part rassurant d’y trouver une grosse entreprise comme EDF. Et puis, par principe de diversification, d’innovation organisationnelle, il est intéressant de voir aussi de plus petits acteurs se lancer sur le marché. Peut-être que ces plus petits acteurs sauraient mieux qu’EDF engager leurs clients dans une démarche de sobriété énergétique, comme les circuits courts alimentaires arrivent à aiguiller leurs consommateurs vers une alimentation plus saine.
Aussi, si vous ne sentez pas le besoin d’être chez EDF pour soutenir psychologiquement la filière nucléaire française et que vous vous sentez l’âme aventureuse, pourquoi ne pas aller explorer ces modèles ? On trouve des coopératives comme Enercoop, des entreprises locales (Gaz et électricité de Grenoble, par exemple) et même, pourquoi pas, le modèle “Off-grid”, c’est-à-dire “hors réseau”. Tout ça est à explorer, des solutions aux défis de demain s’y trouvent peut-être, mais explorons-les en gardant à l’esprit qu’aujourd’hui, le nucléaire est la pire des solutions à l’exception des autres.

Pour la sobriété énergétique ! #teasing

Finalement, nous avons une idée : peut-être que le choix des moyens de production d’électricité, choix s’il en est complexe et technique, n’est pas tant que ça de notre responsabilité en tant que consommateur ? Peut-être que notre première responsabilité est de reprendre en main notre consommation de kilowattheures (kWh). Qui aujourd’hui sait combien de kWh il consomme par an ? On les achète comme on respire, sans s’en rendre compte. Peut-être est-ce là qu’est le cœur de l’enjeu énergétique ?
Dès lors, peut-être que le meilleur fournisseur d’électricité est celui qui va vous inciter à consommer le moins d’électricité ? Que ce soit parce qu’il fait un gros travail de sensibilisation, parce qu’il vous aide à comprendre vos marges de progression ou parce qu’il est cher et que l’on y fait donc plus attention… tous les moyens sont intéressants à explorer. Par exemple, Planète OUI offre 10 % de réduction si l’on renseigne chaque mois sa consommation et 10 % de réduction de plus si notre consommation se trouve sous leur seuil de référence.
Nous avions déjà mentionné la démarche de sobriété énergétique dans notre article sur la transition énergétique. Il s’agit d’utiliser moins et mieux l’énergie que nous avons à disposition. Et nos gestes à notre échelle sont tout aussi importants que ceux des industriels. Faire attention aux heures creuses, ne pas surchauffer notre logement, bien éteindre nos appareils en veille, etc.
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La consommation d’électricité résidentielle en France en 2019 - Crédit photo : EDF
  • 2 223 kWh, c’est la consommation annuelle d’un Français
  • 1 325 kWh/an, c’est la consommation moyenne de l’électroménager et de l’éclairage d’un 30 m²
  • 6 000 kWh/an, c’est la consommation électrique moyenne pour le chauffage d’un 50 m²
  • 259 kWh/an, c’est la consommation électrique moyenne d’un réfrigérateur
  • 324 kWh/an, c’est la consommation électrique moyenne d’une télévision
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Schéma de la démarche négaWatt - Crédit photo : négaWatt
Vous voudriez en savoir plus sur la sobriété énergétique ? Cela tombe bien, car nous allons bientôt y dédier un article. Comprendre le fonctionnement énergétique d’un foyer lambda, le principe des heures creuses, découvrir des outils pour mieux tirer vers le bas sa consommation, comprendre les ressorts psychologiques qui peuvent être utiles dans pareille démarche… D’ailleurs si vous voulez nous aider à faire le tour du sujet, envoyez-nous un mail.

Astuces Carotte

  • Se fournir chez EDF pour montrer qu’on ne crache pas dans la soupe (la soupe étant ici la solution que le nucléaire apporte au problème du changement climatique)
  • Prendre de l’avance sur notre article sur la sobriété énergétique, avec l’offre Planète OUI ou les conseils de l’Ademe pour réduire votre facture d’électricité et/ou ceux de cet article
  • Chez LundiCarotte, nous allons bientôt lancer un programme pour aider nos lecteurs à diminuer leur consommation énergétique. L’idée est de vous prêter un petit appareil pour mesurer la consommation de vos équipements et de vous guider dans l’identification des marges de progression. Si vous voulez être prévenus pour le lancement de ce programme, envoyez-nous un mail en réponse à celui-ci

Question-sondage !

Est-ce que cet article vous donne l’idée de changer de fournisseur d’électricité ?
Laura Larrive, Alix Dodu & Théodore Fechner
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