À l'heure où les Français commencent à planifier leurs vacances de Noël, LundiCarotte se penche sur le sujet de la compensation carbone. Le principe : financer des projets de réduction d'émission de CO2, pour compenser des émissions issues d'autres types d'activités. On profite de l’occasion pour faire le point sur la situation climatique, et les efforts internationaux qui en découlent. Une fois n’est pas coutume, il y aura donc un peu plus de contexte, un peu moins d’astuces pratiques. Bonne lecture !

Il est frais, mon carbone, il est frais !

Le 19 novembre 2018
À l'heure où les Français commencent à planifier leurs vacances de Noël, LundiCarotte se penche sur le sujet de la compensation carbone. Le principe : financer des projets de réduction d'émission de CO2, pour compenser des émissions issues d'autres types d'activités.
On profite de l’occasion pour faire le point sur la situation climatique, et les efforts internationaux qui en découlent. Une fois n’est pas coutume, il y aura donc un peu plus de contexte, un peu moins d’astuces pratiques. Bonne lecture !
Vignette de l'article Il est frais, mon carbone, il est frais !

Caliente caliente

Quelques rappels s’imposent :
  • L’effet de serre est un phénomène physique qui a pour effet d'augmenter légèrement la température terrestre, ce qui contribue actuellement à rendre notre planète habitable.
  • Le réchauffement climatique est un phénomène anthropogène, causé par l’Homme, lié à une augmentation du taux de gaz à effet de serre (dioxyde de carbone, méthane, composés fluorés, …) dans l’atmosphère.
  • Le kilogramme de CO2 équivalent est une unité définie pour pouvoir comparer les différents gaz qui contribuent plus ou moins au réchauffement. En gros, plus il y a de CO2eq émis dans l'atmosphère, plus ça va barder.
« Plus il y a de CO2 équivalent émis dans l’atmosphère, plus ça va barder »
Les scientifiques internationaux, sous l’égide du GIEC (Groupement d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat), s’accordent à dire que le réchauffement climatique aura des impacts multiples sur nos sociétés et nos écosystèmes, notamment : baisse de la productivité des exploitations céréalières, contribution au risque de famines, stress hydrique (manque d’eau potable), risques d’inondations, augmentation du nombre d’évènements climatiques extrêmes, meilleure propagation des maladies contagieuses, augmentation des décès prématurés liés à la chaleur. Tout un programme, donc, qui dépendra fortement de la vitesse de transition vers des énergies moins polluantes, et de la croissance démographique.
Heureusement, depuis le milieu des années 90, la communauté internationale, organisée autour des Nations Unies, s'est décidée à agir. D’abord, en esquissant le Protocole de Kyoto, en 1997, entré en vigueur en 2005, après ratification des 55 états (les délais de la bureaucratie…). Ce protocole actait l’objectif de réduire, entre 2008 et 2012, de 5 % les émissions par rapport à 1990. Le bilan est très mitigé, pour plusieurs raisons :
  • Kyoto ne ciblait que les pays “industrialisés” de l’époque : exit la Chine, l’Inde ou le Brésil.
  • Le Canada a quitté le protocole en cours de route, craignant des sanctions trop importantes.
  • Les États-Unis, plus gros pollueur de l’époque, sous l’impulsion de Georges W. Bush, ont refusé de le ratifier.
En 2015, lors de la COP21, l’ensemble des pays signent l’accord de Paris. Celui-ci met en place des objectifs de réduction d’émissions sans pour autant définir de sanctions pour les pays ne les respectant pas. Toutefois, cet accord souffre déjà du retrait des États-Unis, qui a suivi l'arrivée au pouvoir de Donald Trump.

Kyoto et le marché du carbone

Concrètement, le protocole de Kyoto a défini des seuils d’émissions à ne pas dépasser pour les collectivités territoriales (par exemple, les États). Pour les aider à rester dans les clous, un système de crédits carbones a été créé. Le principe est assez simple : les projets permettant la réduction des émissions en CO2 ou la séquestration du CO2 génèrent des crédits, représentant chacun une tonne de CO2eq. Ces crédits peuvent alors être mis sur le marché et vendus à d’autres acteurs afin de financer les projets.
La compensation carbone, c'est donc un mécanisme permettant à des entreprises, des collectivités ou des gens comme nous de présenter un bilan carbone neutre (c’est-à-dire de n'émettre virtuellement aucun CO2eq) en rachetant autant de crédits carbone que ce qu’ils ont émis.
Il existe deux marchés du carbone : le marché globalisé et le marché volontaire. Le premier concerne par exemple les États, qui se sont engagés à respecter des quotas d'émission. Le marché volontaire, quant à lui, concerne ceux qui veulent gérer leurs émissions en interne avant de présenter leur bilan, ou en faire plus.
En pratique cela veut dire que quand un organisme déclare avoir réduit de tant de % ses émissions, il est possible que ses émissions “directes” soient restées les mêmes mais qu’il ait investi dans des solutions de réduction ou de séquestration carbone dans une autre zone, par exemple dans les pays du Sud.
En somme, le marché du carbone donne le choix aux entreprises : elles peuvent s'employer à réduire leurs propres émissions, ou bien financer des projets qui réduiront les émissions ailleurs. Là où c'est intéressant, c'est que pour une même quantité d'argent, la compensation carbone permet parfois de réduire davantage les émissions globales ! Après avoir chuté à 4 €, le prix de la tonne de carbone remonte et vaut actuellement près de 20 €.
Mais le marché du carbone n’est pas réservé qu’aux entreprises, les particuliers peuvent également compenser leur carbone via le marché volontaire.

La compensation en pratique

Au sein de la rédaction de LundiCarotte, on fait pas mal d'efforts pour réduire notre empreinte personnelle ! Seulement, il y a toujours des émissions qu'il est difficile d'éviter - ne serait-ce que prendre la voiture tous les jours pour se rendre à son travail pour certaines personnes. Dans ces cas-là, la compensation carbone est une des solutions possible pour diminuer son impact.
Donnons un peu de concret, et reprenons l'exemple de notre article sur le transport en vacances. Pour compenser les émissions générées par un aller-retour Paris-Barcelone en avion, il vous en coûtera un peu moins de 15 €.
« Pour compenser les émissions générées par un aller-retour Paris-Barcelone en avion, il vous en coûtera un peu moins de 15 € »
Vous trouverez toutes les informations nécessaires en vous rendant sur le site Info Compensation Carbone, soutenu par l'Ademe et le Ministère de la Transition Écologique.
Vous pourrez alors choisir le projet que vous souhaitez financer, selon des critères tels que sa zone géographique et le domaine dans lequel il a lieu : forêt et agroforesterie, énergie, gestion des déchets…
Vous pouvez par exemple financer des cuiseurs solaires qui limiteront la déforestation, ou des digesteurs à biogaz qui fourniront une énergie propre aux populations concernées.
Mais la compensation est-elle une solution magique à tous nos tracas carbonés ?

La compensation : avantages et inconvénients

La compensation carbone est très largement discutée par les experts du climat et de l’écologie. Certains saluent la démarche tandis que d’autres la qualifient de démocratisation du “droit à polluer”, comme une manière d’acheter sa place au paradis des écolos. LundiCarotte vous propose de revenir sur l'intérêt et les limites de cette méthode.
L'intérêt de la compensation carbone, c'est qu'elle permet de financer des projets de réductions de CO2 qui n'auraient pas vu le jour sans cet apport d'argent.
D'autre part, les projets de compensation carbone peuvent dépasser leur dimension environnementale et permettre d’améliorer significativement les conditions de vie de ces populations. Dans ce cas, la démarche de compensation dans un pays en développement s’inscrit dans une politique plus large d’engagement pour une solidarité internationale.
D'un autre côté, tous les projets de compensation carbone ne se valent pas. Si certains permettent d'éviter la réduction de CO2 immédiatement après leur mise en place (comme remplacer une technologie polluante par une autre plus moderne), d'autres agissent sur la durée, et mettent plus de temps pour atteindre le même objectif de réduction. Ceci, alors que le GIEC préconise d'agir immédiatement pour lutter contre le réchauffement.

Prenons du recul

Le meilleur moyen de compenser ses émissions est sans doute de ne pas émettre en premier lieu.
Pour ce qui est de réduire son empreinte carbone personnelle, les ressources ne manquent pas (à commencer par votre newsletter préférée). On vous conseille également l'application 90jours, ainsi que le site de l'Ademe, qui informe sur de nombreuses démarches écocitoyennes (telles que l'isolation de son logis).
Dans un deuxième temps, vous pouvez estimer votre empreinte carbone ! Le site footprintcalculator.org vous dressera un petit bilan en à peine 2 minutes.
Selon l'Ademe, c'est dans un troisième temps seulement (après avoir réduit ses émissions et estimé son impact) que la question de compenser ses émissions se pose.
La possibilité de compenser ses émissions pourrait laisser croire que les gestes individuels seraient la solution à tout. Mais il est aussi possible de se prononcer sur le plan politique, que ce soit au sujet des infrastructures, des politiques gouvernementales ou des règlementations à appliquer aux entreprises (prochaines élections fin mai 2019 !)
En somme la compensation carbone ne reste qu'un moyen parmi de nombreux autres de réduire l'impact de l'humanité sur l'environnement… Et sur elle-même !
« Comme le dit l’Ademe, le meilleur moyen de compenser ses émissions est sans doute de ne pas émettre en premier lieu »

Les AstucesCarotte pour une empreinte carbone raisonnable

  • pour diminuer à la source, on vous recommande sans hésiter ce jeune média sur la consommation durable  ! lundicarotte.fr
  • pour estimer son empreinte carbone en 2 minutes : footprintcalculator.org
  • pour comparer les différentes possibilités de compensation carbone, on vous recommande ce site très didactique ! info-compensation-carbone.com
  • pour orienter sa carrière vers la réduction des risques de réchauffement climatique extrême, nous vous recommandons le dossier du site 80000hours.org (en anglais).
Dans la suite de l'actualité, la COP24 débutera le lundi 3 décembre. On vous souhaite une bonne semaine !
Servane Courtaux et Paul Louyot
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