LundiCarotte est dans l’air du temps. Alors que de nombreux Français se sont mobilisés contre la hausse des prix de l’essence, pour notre rentrée, nous abordons le sujet des biocarburants. Bouclez votre ceinture, on démarre sur les chapeaux de roues !

Rouler au vert

Le 7 janvier 2019
LundiCarotte est dans l’air du temps. Alors que de nombreux Français se sont mobilisés contre la hausse des prix de l’essence, pour notre rentrée, nous abordons le sujet des biocarburants.
Bouclez votre ceinture, on démarre sur les chapeaux de roues !
Vignette de l'article Rouler au vert

Pourquoi des biocarburants ?

Nos voitures roulent très bien à l’essence, alors pourquoi s’embêter à produire de nouveaux carburants ? Il y a deux bonnes raisons à cela : d’abord, les carburants d’origine fossile ne sont pas inépuisables. Ensuite, ceux-ci relâchent d’importantes quantités de CO2 lors de leur combustion, ce qui contribue au réchauffement climatique.
En France, les déplacements routiers représentent 93 % des émissions du secteur des transports, le plus polluant du pays.
C’est là que les biocarburants (ou carburants d'origine végétale) entrent en jeu. L'idée, c'est de produire de l'énergie à partir de plantes, ces dernières ayant le bon goût d'absorber du CO2 lors de leur croissance. Comme du carburant classique, le biocarburant relâche du CO2 lors de sa combustion ; mais le bilan global de l'opération pourrait bien être plus propre qu'avec des combustibles fossiles. Cependant, et comme nous allons le voir, la réalité n'est pas aussi simple.
« Les biocarburants auraient le potentiel d'être moins polluants que les combustibles fossiles »
À noter que la technologie n'est pas récente, étant donné que la première voiture commercialisée, la Ford T, était prévue pour rouler à l’alcool.
Aujourd'hui, ce que l'on appelle les biocarburants, ou agrocarburants, ce sont ceux produits à partir de matière organique végétale (la biomasse).

Posons quelques repères

Il existe deux types de biocarburants : à base d’alcool et à base d’huile. Pour désigner leur provenance et l’avancée des recherches à leur sujet, on parle de différentes générations de biocarburants :
  • Les biocarburants issus de plantes alimentaires comme l’éthanol fait à partir de betteraves ou le biodiesel d’huile de tournesol forment la première génération.
  • Pour ne pas concurrencer le marché alimentaire et encourager la revalorisation de certains produits végétaux, on développe aujourd’hui les biocarburants de deuxième génération (déchets végétaux, huiles de récupération, bois).
  • La troisième génération en est encore au stade de la recherche et concerne les algocarburants, faits à partir de microalgues.
Tout cela nous semble très prometteur. Cependant, il s'avère que les biocarburants ne font pas l’unanimité.

Du Nutella dans mon moteur ?

Parmi les carburants de première génération, les biodiesels peuvent être produits à partir de plusieurs plantes oléagineuses, dont, vous le voyez venir gros comme une maison… le palmier à huile ! Cette plante-là n'a pas bonne réputation (cf. notre dossier sur le sujet) et ce ne sont pas les biocarburants qui vont redorer son blason : pas plus tard que cet été, Total se trouvait impliqué dans un potentiel scandale écologique.
En cause, le projet de transformer la raffinerie de La Mède en bioraffinerie d’huile de palme, propulsant la France au top des pays importateurs de ce produit. C’est un véritable ascenseur émotionnel qui a secoué la rédac' de LundiCarotte lorsqu'elle a découvert que l’Assemblée nationale avait décidé d’exclure l’huile de palme de la liste des biocarburants autorisés en France, mais qu’il y a quelques semaines, le Sénat avait fortement limité cette interdiction.
Pour en savoir plus sur le bras de fer entre Total, les pays exportateurs d’huile de palme, Nicolas Hulot et les ONG environnementales, on vous invite à lire cet article de Libération.
« L'huile de palme n'a pas bonne réputation et ce ne sont pas les biocarburants qui vont redorer son blason »
Derrière cette affaire, c'est la biodiversité qui est en jeu : la culture de l'huile de palme provoque actuellement une déforestation importante dans les pays d’Asie du Sud-Est. Même en utilisant de l’huile certifiée, le remplacement de forêts par des cultures reste nécessaire pour produire des biocarburants, ce qui est dommageable pour la faune et la flore et donc, indirectement, pour nous autres les humains. Le même problème se pose d’ailleurs avec l’huile de soja au Brésil.
Pour autant, ne mettons pas tous les biocarburants dans le même sac. Le potentiel de certains d'entre eux nous paraît justifié : un rapport de l'ONG européenne Transport et Environnement montrait en 2015 que les biocarburants à base de betterave et de maïs, par exemple, sont deux fois moins émetteurs de CO2 que les carburants fossiles.
Cependant, cette technique de production de carburant n'est pas encore applicable à l'échelle mondiale : avec les technologies actuelles, et si l'on voulait remplacer l'intégralité des carburants consommés en France par du bioéthanol à base de betterave, il faudrait convertir pas moins de 23 % du territoire français à la culture de cette plante. Ce n'est donc pas demain que nous roulerons tous aux agrocarburants.

Une histoire de générations…

Au-delà de la déforestation et des problèmes de concurrence sur le marché des plantes alimentaires, la recherche et les initiatives locales s'accélèrent autour des biocarburants de deuxième et troisième générations. Qu’il s’agisse d’employer des produits déjà utilisés dans un autre secteur pour leur donner une seconde vie ou de transformer une filière vieillissante, ces acteurs s’inscrivent dans une démarche de durabilité.
Ainsi, plusieurs projets ont attiré notre curiosité :
  • La Baraque à Huile, une jeune pousse entrepreneuriale du ch’Nord qui propose de récupérer les huiles de friture usagées pour en faire du carburant.
  • Bio-Bean, une autre jeune pousse qui permet à des bus londoniens de rouler avec un carburant composé de 20 % de marc de café collecté dans les bars et les restaurants.
  • La filière du tabac, qui fait vivre des milliers d’agriculteurs en Afrique, mais qui est aussi responsable de milliers de cancers du poumon, envisage de se reconvertir dans le biocarburant.

Pour rouler au biocarburant en France, je fais comment ?

Sans le savoir, nous consommons déjà des agrocarburants qui sont utilisés en mélange dans les essences conventionnelles. Ainsi, le site du ministère de l’écologie nous informe que le SP95 peut monter jusqu’à 10 % de bioéthanol tandis que le gazole peut contenir jusqu’à 8 % de diesel d’origine végétale. Ces proportions permettent de ne pas avoir à modifier le moteur.
Nombreux sont les consommateurs qui souhaitent diminuer leur impact écologique en troquant leurs carburants majoritairement fossiles pour une solution totalement végétale. Il existe d’ores et déjà une catégorie de véhicules, dits FlexFuel, qui permettent de rouler avec différents types de carburants.
Pour les autres, cependant, il faut installer un kit qui modifie les paramètres du carburateur. Le Figaro résume dans cet article les démarches à effectuer et dresse sa conclusion après plusieurs milliers de kilomètres. Le bilan : malgré une consommation de carburant en hausse, le coût d’installation peut être amorti en moins de deux ans.
Petite mise en garde, cela dit : la rédaction de LundiCarotte ne saurait que trop recommander d’être extrêmement prudent dans l’altération d'un véhicule et préconise une intervention par un personnel expert uniquement. N’est pas mécanicien qui veut !
Une fois votre véhicule équipé, il ne nous reste plus qu’à nous munir d’une application pour rechercher les stations-service proposant du bioéthanol comme Mes Stations E85 ou encore à consulter la liste ici.

Cher LundiCarotte, je n’ai rien compris à cet article

Du mal à y voir clair dans ce nuage de carburants, d’arguments pour et contre ces alternatives à l’essence classique ? Pour l’instant, aucune des solutions présentées précédemment n’est viable à l’échelle globale. Une réduction de notre consommation globale de carburants reste donc nécessaire. En revanche, certaines technologies déjà accessibles ont moins d'impact que les carburants fossiles - c'est le cas du bioéthanol à base de betterave.
« Même si le bioéthanol est moins impactant que les combustibles fossiles, une réduction de notre consommation globale de carburants reste nécessaire. »
Si on a la chance d’habiter près d’une station qui en propose et que l’on ne peut pas se passer de sa voiture pour ses déplacements, il semble à la rédaction de LundiCarotte que tenter l’aventure bioéthanol est un bon compromis !
Au niveau national, on encourage la recherche dans les filières de revalorisation des “déchets végétaux” et on se mobilise contre les projets impliquant l’huile de palme.

Les AstucesCarotte pour rouler durable

Quand nous avons commencé nos recherches, nous n'y connaissions rien et nous sommes désormais très enthousiasmés par le sujet !
Pour une lecture fascinante sur le sujet des biocarburants, on vous recommande également le dossier d'encyclopedie-environnement.org.
Pour les concernés, on vous souhaite une bonne rentrée, et on vous dit à lundi prochain !
Servane Courtaux et Paul Louyot
Partager ce LundiCarotte
MAILTWFB